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Title

L'an 1719, le mercredi 20e jour de septembre

Description

Archives des Comm., nº3369.

Date

20/09/1719

Identifier

Campardon, p. 10

Text Item Type Metadata

Text

L'an 1719, le mercredi 20e jour de septembre, nous Joseph Aubert, etc., en exécution des ordres à nous donnés par M. le lieutenant général de police, sur les six heures du soir, nous sommes transporté à la foire Saint-Laurent, dans le jeu des danseurs de corde établi dans le petit préau de ladite foire. Où étant, après la danse de corde, il nous est apparu et avons remarqué dans la comédie qui s'est jouée tant par les danseurs, sauteurs, voltigeurs et autres comédiens forains, ce qui suit : Dans le premier acte ou prologue a paru sur le théâtre un pierrot qui a fait battre le tambour, a lu une prétendue affiche pour enrôler toutes sortes de personnes pour le voyage de Congo. Plusieurs acteurs de foires comme sauteurs, danseurs de corde et autres viennent pour s'enrôler à Pierrot qui, en les engageant, dit quelques paroles. Ces acteurs ne parlent point. Un arlequin, aussi sans parler, faisant plusieurs postures et lazzis, s'engage pour Congo. Un autre acteur, représentant un poëte, faisant plusieurs figures et postures, s'engage de même. Avant un prétendu embarquement pour Congo, Pierrot chante et joue sur sa guitare deux ou trois couplets de chansons en vaudevilles.

Dans le deuxième acte, le théâtre change et représente un bois. Arlequin, dans ce bois, en faisant beaucoup de lazzis et disant quelques paroles de tems à autre, plaint son sort de se trouver perdu dans ce bois et, en se parlant à lui-même, fait plusieurs lazzis. Il cherche dans ce bois de quoi satisfaire sa faim. Il trouve une citrouille au sujet de laquelle il fait plusieurs lazzis, puis un melon qu'il veut manger avec du pain qu'il a dans un bissac. Il se couche à cet effet par terre et voulant boire à même une bouteille qu'il a dans son bissac, un acteur sous la forme d'un perroquet perché sur un arbre dit ces mots : « A la cave ! à la cave ! » ce qui donne lieu à Arlequin de se relever et de faire plusieurs lazzis. Croyant entendre quelqu'un et apercevant ce perroquet, il l'appelle ; celui-ci descend sur le théâtre. Arlequin veut l'attraper, ce qu'il ne peut, le perroquet l'évitant en se retirant de dessus le théâtre. Arlequin se remet à manger. Un acteur sous l'habit d'un singe, aussi perché sur un arbre, saute sur le théâtre, fait plusieurs postures et sauts de singe. Des bêtes fauves et un ours, se voyant poursuivis par des chasseurs, se jettent sur Arlequin qu'ils rencontrent. Les chasseurs le délivrent et tuent l'ours. Arlequin fait plusieurs lazzis en disant quelques paroles à ce sujet. Il leur demande le chemin de Congo ; ils lui répondent en parlant une langue étrangère et tous se retirent. Un amant et une Colombine paroissent, se parlant par gestes. L'amant ne lui dit que deux mots et se retire. Colombine parle et dit qu'elle seroit fâchée que Pierrot l'eût surprise avec son amant. Pierrot survient qui lui dit quelques mots. Le théâtre change et représente une salle où le grand seigneur de l'île de Congo paroît et à haute voix fait un monologue sur ce que les acteurs, comédiens et les sauteurs qu'on lui a dit être arrivés dans son île ne sont pas venus faire la révérence et demander sa protection. Ces acteurs paroissent sur-le-champ. Le grand seigneur leur demande les uns après les autres leurs personnages et ils lui répondent par gestes. Il ordonne à Pierrot de jouer de la guitare, ce qu'il fait en chantant un vaudeville. Le grand seigneur commande aux sauteurs de faire leurs exercices et aussitost ils font leurs exercices de sauteurs.

Le troisième acte, le théâtre change et représente au fond un puits. Un acteur, représentant un magicien, paroît et dit à haute voix que le grand seigneur lui a dit de faire boire de l'eau du puits de la vérité à tous les nouveaux venus dans son île pour connoître leurs défauts. Ce magicien, en faisant quelques lazzis, appelle des esprits soumis à ses commandements. Ils paroissent et découvrent ce puits. Ensuite deux hommes en habits françois en se tiraillant paroissent sur le théâtre. Par leurs gestes le magicien connoît que l'un a volé à l'autre des effets en papier. Il lui fait boire de l'eau du puits de la vérité qui lui fait faire plusieurs contorsions et lui fait jeter par la bouche les effets qu'il avoit pris. Paroît ensuite un vieillard avec sa femme à laquelle le magicien fait boire de l'eau de la vérité. Elle refuse d'en boire, mais étant forcée d'en boire, elle dit au vieillard, son mari, qu'elle aimeroit mieux crever que de parler, et après en avoir bu elle déclare au vieillard qu'elle avoit fait une maladie pour avoir été au bal et qu'elle y avoit tant dansé la mariée qu'elle en avoit eu les bras et les jambes rompus. Elle se retire avec le vieillard. Une jeune fille paroît ensuite en faisant la niaise et dit au magicien que Pierrot lui a pris et, en hésitant, répète lui a pris son papillon. Elle prie le magicien de lui donner de l'eau du puits de la vérité pour savoir où Pierrot a mis son papillon. Le magicien lui donne de l'eau et dit que son eau ne sait pas trouver aux filles ce qu'elles ne perdent qu'une fois. Arlequin en cabaretier paroît, fait un monologue sur ce que le puits de la vérité lui ôte sa pratique. Il boit de cette eau, fait plusieurs lazzis en supposant le mélange que les cabaretiers font et il dit au magicien qu'il s'en plaindra au grand seigneur. Un acteur vêtu de noir, avec des sacs de papiers qui le désignent pour la chicane, et deux autres acteurs vêtus de noir viennent pour combler le puits. Le magicien appelle ses esprits qui, avec lui, se jettent sur la chicane et ses assistans et les jettent dans le puits. Deux fusées en feu forment le dénouement de cette pièce qui est sans suite et irrégulière.

Dont et de tout ce que dessus nous avons fait et dressé le présent procès-verbal.

Signé : AUBERT.

Original Format

Archive de police

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This Item Description Item: Charles Alard et Pierre Alard